Apprivoiser la fièvre pour mieux la soigner à l'aide des plantes médicinales

Caroline Gagnon
Dès les premiers signes, nous sommes déjà sur nos gardes. Des frissons alors que la température corporelle monte et l’impression d’avoir mal dans les os : serait-ce la fièvre? Lorsque l’on constate son arrivée, notre réflexe est souvent de vouloir la combattre. Pourtant, la fièvre n’est pas une maladie, mais un mécanisme de défense inné, engendré par le corps lui-même. Elle a comme but d’aider au retour à l’équilibre, en nous incitant au repos et en accélérant le métabolisme. Sa mise en branle crée dans le corps un climat favorable à l’action des cellules immunitaires et défavorable aux micro-organismes pathogènes.

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Dans cet article
Pourtant, on a souvent le réflexe de chercher à inhiber la fièvre avec des médicaments antipyrétiques, tels que l’acétaminophène (paracétamol), l’acide acétylsalicylique (Aspirine®) et l’ibuprofène. L’idée n’est pas de les éviter à tout prix (voir encadré), mais plutôt de ne pas en consommer inutilement, puisqu’ils ont tous de potentiels effets indésirables.

En cas de fièvre, on peut simplement surveiller son évolution et... utiliser des plantes médicinales pour la faire aboutir plus rapidement et atténuer les inconforts qui y sont associés! Dans cet article, pour vous aider à apprivoiser la fièvre, nous vous présentons les symptômes associés à son déroulement normal ainsi que les plantes médicinales vers lesquelles nous nous tournons lorsque nous ou nos proches en souffrons. Avec ces trucs en poche, nous espérons que vous serez plus à l’aise de la laisser réaliser son important travail, tout en vous sentant outillé.e pour agir.
Avertissement 
•Nous ne sommes pas médecins et cet article ne représente pas un avis médical.
•Si votre état de santé ou celui de l’un de vos proches vous inquiète, consultez les services de santé.
•La température normale du corps et celle d’une fièvre considérée non sécuritaire varient en fonction de facteurs comme l’âge et l’endroit du corps où la température est mesurée (p. ex. bouche, aisselle ou rectum). Vous trouverez facilement ces différentes valeurs de référence sur Internet.
•Si vous choisissez de consommer des médicaments contre la fièvre disponibles en vente libre, assurez-vous de respecter la posologie inscrite sur l’emballage. Au besoin, n’hésitez pas à demander conseil en pharmacie.

Observer : à chacun.e sa fièvre

D’abord, on devra adopter un plan d’action différent selon la cause spécifique de la fièvre. Par exemple, une fièvre liée à un coup de chaleur ou à la déshydratation ne peut pas être prise en charge de la même manière qu’une fièvre due à une infection. Alors que la première est souvent dangereuse, puisqu’elle apporte encore plus de chaleur dans un organisme déjà accablé par une hausse de température, la deuxième a plutôt la réputation de combattre le micro-organisme qui nous a infecté. Le présent article vise à partager nos astuces d’herboristes en cas de fièvre associée à une infection bénigne.
«La fièvre est un mécanisme de défense, mais c’est aussi un signal d’alarme
que le corps nous envoie, un signe que quelque chose cloche.»
Si on a la grippe, il est normal de faire de la fièvre, mais si on fait de la fièvre sans raison apparente et qu’une journée de repos ne suffit pas à la faire passer, c’est une bonne raison de consulter un médecin, même si ce n’est pas nécessairement une urgence.

Ensuite, il faut comprendre que la fièvre se manifeste différemment d’une personne à l’autre, en fonction de sa constitution. Par exemple, certaines personnes ont tendance à faire de la fièvre à une température élevée chaque fois qu’elles sont malades, alors que d’autres n’en font pratiquement jamais et restent à une température plus basse. Plus une fièvre nous apparaît anormale, plus notre niveau de vigilance devrait être élevé.
Apprendre à observer notre corps et celui de nos proches, en particulier de nos enfants, est la première étape vers l’apprivoisement de la fièvre. C’est à travers cette observation attentionnée du corps que l’on en vient à connaître les réactions particulières de chacun et à se sentir capable de déterminer s’il y a lieu de s’inquiéter ou pas.
Finalement, il est sécurisant de savoir qu’il est normal que la fièvre se manifeste de façon différente chez l’adulte et chez l’enfant. Chez les enfants, la fièvre est souvent plus subite et plus intense, puisque leur niveau d’énergie et leur métabolisme sont plus élevés. Il n’est pas rare non plus que la fièvre des enfants soit accompagnée de délires fébriles et même de convulsions (nous y reviendrons plus loin). Chez les adultes, la fièvre a tendance à évoluer à un rythme plus lent et à durer plus longtemps. Comprenez que ce ne sont là que des généralisations et qu’il y a toutes sortes d’exceptions possibles. Ce que nous voulons souligner ici, c’est que les mêmes symptômes, chez un enfant versus chez un adulte, n’appellent pas nécessairement la même réaction. Cela dit, rappelez-vous qu’il est parfaitement justifié de consulter les services de santé si l’état de l’un de vos proches vous inquiète, et ce, peu importe ce que vous dit le thermomètre ou ce qu’il est écrit ici ou ailleurs.
Consultez les services de santé si :
• La fièvre affecte un nourrisson de moins de trois mois;
• La fièvre dure plus de 4 jours;
• La température excède les 41°C;
• La fièvre s’accompagne d’une profonde léthargie et de confusion;
• La fièvre s’accompagne de maux de tête violents, de vomissements en jets, de douleurs abdominales importantes et de raideurs au cou.

 S’adapter d’heure en heure : soutenir le processus

Au début d’une fièvre, il peut être pertinent d’aider le corps de la personne fiévreuse à se réchauffer. En effet, lorsque le corps cherche à « installer » la fièvre, cela lui demande une quantité d’énergie considérable. Tant et aussi longtemps que la personne se sent fiévreuse, mais a toujours les mains et les pieds froids, c’est que le corps cherche encore à augmenter sa température. C’est d’ailleurs souvent à ce moment que l’on ressent des frissons et que l’on a « mal à la peau ». Des couches de vêtements supplémentaires, une couverture ou un bon bain chaud aideront la fièvre à suivre son cours et à préserver les réserves d’énergie de la personne malade. On pourra retirer la source de chaleur lorsque les extrémités seront chaudes et que la personne commencera à suer : signes que sa température a probablement atteint son paroxysme et va se stabiliser ou commencer à redescendre.

Pour aider le processus de la fièvre à se mettre en branle chez l’adulte, le gingembre est très efficace. Comme on l’a dit plus haut, le corps de plusieurs adultes a besoin d’un coup de pouce supplémentaire pour augmenter sa température et parvenir à combattre les infections. Dès que vous ressentez des symptômes de fièvre (courbatures, frissons, « mal à la peau », etc.), préparez-vous une infusion de gingembre (Zingiber officinalis), en laissant simplement mijoter une dizaine de tranches de gingembre frais dans un litre d’eau. Selon notre expérience, siroter cette décoction de gingembre, se garder au chaud et se coucher tôt peut parfois suffire pour aider le corps à combattre un rhume en moins de 24 heures.
Plantes diaphorétiques
En herboristerie traditionnelle, on qualifie de diaphorétiques les plantes qui contribuent à faire aboutir la fièvre.

Quand le corps semble avoir du mal à faire monter sa température, que la personne est fiévreuse, mais que les extrémités de son corps sont froides, on se tourne vers des plantes qualifiées de diaphorétiques « chaudes » (p. ex. gingembre et hysope).

Quand la peau de la personne fiévreuse est rouge et chaude, mais que la fièvre ne redescend pas, on utilise des diaphorétiques « froides » (p. ex. sureau, cataire, mélisse, achillée millefeuille et eupatoire perfoliée).

Les propriétés diaphorétiques chaudes et froides ainsi que les plantes présentant ces propriétés sont présentées plus en détails dans notre cours Materia Medica
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La fièvre chez l’enfant

Chez l’enfant, il n’est pas rare que la fièvre soit accompagnée de délires et de convulsions fébriles. Les délires fébriles donnent l’impression que l’enfant n’arrive pas à se réveiller d’un cauchemar. Certains enfants deviennent très agités, tiennent des propos incompréhensibles ou ne reconnaissent même plus leurs propres parents pendant quelques minutes, ce qui peut être très insécurisant. Toutefois, les délires fébriles infantiles ne sont généralement pas dangereux. Les convulsions fébriles, quant à elles, correspondent à un tremblement généralisé. Elles sont différentes des convulsions épileptiques et sont généralement inoffensives. Même si elles peuvent être impressionnantes, on peut simplement accompagner l’enfant en s’assurant qu’aucun objet autour de lui ne puisse le blesser, en le tournant sur le côté, en le touchant doucement sans chercher à l’empêcher de trembler et en le rassurant. Certains enfants présentent des délires et/ou des convulsions fébriles chaque fois qu’ils ont de la fièvre, alors que d’autres n’en feront jamais de leur vie.

Pour soulager un enfant fiévreux et lui permettre de se reposer (tout en donnant aussi une pause aux parents), on peut faire appel aux plantes médicinales. Avec ou sans convulsions et délires fébriles, il n’est jamais facile de voir son enfant fiévreux ou mal en point et il est normal de chercher à le soulager. Puisque, comme mentionné plus haut, l’organisme des enfants n’a généralement pas besoin d’aide pour mettre en branle la fièvre, on va généralement choisir pour eux des plantes diaphorétiques froides.

Le sureau est notre plante diaphorétique froide préférée pour les enfants, en plus d’être une antivirale remarquable. C’est donc une plante très utile en cas de rhume, de grippe et de plusieurs maladies infantiles éruptives comme la varicelle, la roséole, etc. Pour l’effet diaphorétique, utile en cas de fièvre, on utilise précisément les fleurs de sureau (Sambucus nigra et S. canadensis). On peut les acheter séchées et les consommer en infusion (2g de fleurs séchées (environ 1 cuillère à soupe)/tasse d’eau bouillante), mais il est souvent plus facile de donner aux enfants une dose suffisante de sureau sous forme de teinture, en leur donnant environ 1 mL de teinture dans un peu d’eau 5 fois par jour. Évidemment, le sureau peut aussi venir en aide aux adultes.
Pour leur effet calmant, la mélisse, la cataire et la camomille allemande sont aussi de précieuses alliées en cas de fièvre chez les enfants. La mélisse (Melissa officinalis), comme le sureau, est aussi une antivirale, alors que la cataire (Nepeta cataria) et la camomille allemande (Matricaria recutita) apaisent très efficacement la plupart des enfants. Toutes trois sont aussi des plantes pouvant être qualifiées de diaphorétiques froides. Qu’elles soient données en infusion ou en bain (en préparant une infusion forte que vous ajouterez à l’eau du bain ou en les ensachant dans un coton à fromage ou un bas pour les infuser directement dans le bain), nous ne serions pas surprises que vos enfants redemandent eux-mêmes de ces plantes le lendemain ou lors de leur prochaine fièvre!

La fièvre chez l’adulte

Le bon vieux truc de grand-mère du drap froid reste un « casse-grippe » merveilleux. Aussi appelé hydrothérapie, l’alternance entre chaud et froid peut aider à faire aboutir une fièvre, en favorisant le processus de sudation et d’élimination des toxines. Rares sont les parents qui ont le cœur à l’essayer sur leurs enfants, c’est donc généralement une astuce qu’on réservera aux adultes. Nous vous invitons à l’essayer sur vous un jour, afin d’en ressentir les bienfaits. Il s’agit de prendre d’abord un bain d’au moins dix minutes, dans lequel on a ajouté du gingembre sec en poudre, tout en buvant une infusion de gingembre ou d’achillée millefeuille, dans le but d’ouvrir les pores de la peau. Ensuite, à la sortie du bain, on se couvre quelques secondes d’un drap mouillé avec de l’eau froide ou tiède qu’on prendra le temps d’essorer. Cela provoquera un léger choc thermique. Finalement, on s’enroulera dans un drap sec et dans une ou plusieurs couvertures avant d’aller au lit pour dormir profondément. La sudation risque d’être abondante et il faudra changer le drap une fois la fièvre passée.

L’eupatoire perfoliée est déconseillée aux enfants, mais s’avère très efficace pour calmer la fièvre chez l’adulte, en particulier chez ceux qui ressentent beaucoup de douleurs musculaires. Aussi appelée eupatoire blanche (Eupatorium perfoliatum), nous avons vu cette plante faire aboutir une fièvre suite à la consommation de 10 gouttes de teinture seulement.

Dans tous les cas (adultes ou enfants), il faut garder la personne fiévreuse bien hydratée. L’eau à la température de la pièce est souvent plus facile à boire en cas de fièvre. Il faut proposer de l’eau fréquemment à une personne fiévreuse et l’inciter à boire même si elle n’en a pas vraiment envie.

Se reposer : ne pas sous-estimer l’importance de la convalescence

Le simple repos est un outil puissant dès les premiers signes de fièvre, pendant la fièvre, mais aussi après. La fièvre est source de fatigue pour le corps et il est indiqué de continuer à dorloter la personne même une fois l’épisode terminé. Lui préparer des bouillons (de poulet, de légumes ou de miso) ou des soupes et l’inciter à rester un peu au lit est une bonne façon de l’aider à se réhydrater et à retrouver sa vitalité.

Conclusion : apprendre à faire confiance à son jugement

Nous espérons que les astuces d’herboristes que nous vous avons présentées vous aideront à faire face à votre prochaine fièvre avec plus d’assurance. Nous souhaitons surtout vous avoir encouragé à faire confiance à vos observations et à votre jugement lorsque la fièvre se présente. Il n’y a aucune honte à administrer des antipyrétiques à son enfant, surtout lorsque la fièvre perdure et que l’on souhaite lui permettre de dormir un peu. C’est votre choix avant tout. Il faut simplement se rappeler que la plupart des antipyrétiques présentent une certaine toxicité pour le foie et qu’inhiber la fièvre n’est pas toujours la meilleure option, puisque celle-ci aura parfois tendance à revenir et à durer plus longtemps.

Peut-être verrez-vous maintenant ce mécanisme d’un autre œil : non pas comme un ennemi à vaincre, mais plutôt comme un potentiel allié dans votre propre combat contre une infection. Comme l’a si bien dit Hippocrate :

« Donnez-moi une bonne fièvre et je guérirai n’importe quelle maladie »
Les plantes médicinales sont-elles sécuritaires?

L'herboriste Caroline Gagnon répond à cette question dans une courte entrevue!

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